|
||||||||||||||||||||||||||||||||||
Droit
Fondamental |
LONDRES, 8 mars 2008 (AFP) - Plusieurs centaines de personnes ont manifesté samedi à Jersey pour affirmer leur soutien aux centaines de victimes présumées de sévices sexuels, pensionnaires d’un ancien orphelinat de l’île anglo-normande.
Les manifestants se sont réunis sur la place Royale de Saint-Hélier, la capitale
de Jersey, devant le siège du gouvernement où ils ont observé une minute de
silence en hommage aux jeunes victimes hebergées dans l’orphelinat du Haut de
la Garenne. Ils ont appelé le gouvernement de l’île à faire toute la lumière
sur ce qu’il s’est réellement passé dans l’ancien orphelinat. "Il y a des
hommes politiques sur cette île qui veulent garder le silence sur ces événements
et donner une image positive de l’île", a déclaré une des manifestantes
Karen Corbel. "Mais quand on en arrive là, je crois qu’il nous faut nous
arrêter, écouter et trouver ce qu’on doit faire pour nous assurer que cela n’arrivera
plus jamais", a-t-elle ajouté. Selon la police, une centaine de personnes
ont affirmé avoir été maltraitées lors de leur séjour au Haut de la Garenne,
et 25 personnes sont soupçonnées d’avoir commis des abus sexuels et des violences,
y compris des responsables de l’établissement et un ancien responsable politique.
Dans le cadre de cette vaste enquête ouverte en novembre sur plusieurs organisations
de l’île, les policiers - qui affirment enquêter sur une quarantaine de suspects
- doivent encore vérifier 262 appels de victimes potentielles. Un crâne d’enfant
a été retrouvé samedi 23 février au Haut de la Garenne, un ancien pensionnat
transformé en foyer pour enfants en difficulté jusqu’en 1986, puis reconverti
en auberge de jeunesse en 2004. Les jeunes pensionnaires auraient subi des sévices
pendant une quarantaine d’années, entre les années 1950 et la fin des années
1980.
Entre les années 1960 et 1986, plus de 160 personnes auraient été victimes de maltraitance dans l’orphelinat Haut-de-Garenne, situé sur l’île de Jersey. Mi-février, un crâne d’enfant y était découvert. Sauf qu’il pourrait s’agir d’un faux.
Explication : dans les années 80, le bâtiment a été utilisé comme décor pour
une série télé policière. Et, dans le cadre du tournage, un faux cimetière avait
été aménagé au sein de l’établissement… Des vérifications sont en cours. En
attendant, une seule certitude : les responsables du tourisme de l’île anglo-normande
ont jugé que la promotion lancée fin décembre était aujourd’hui « inappropriée
». Elle a été stoppée.
La police de Jersey, qui a repris les fouilles dans un ancien orphelinat au coeur d'une enquête sur des sévices présumés, a annoncé lundi avoir fait de nouvelles découvertes dont une baignoire en béton et un message poignant sur un mur.
En déblayant une cave murée au sous-sol du Haut de la Garenne, percée la semaine dernière, les enquêteurs ont trouvé une grande baignoire en béton où, selon des témoignages de victimes, des enfants auraient été plongés dans de l'eau froide avant de subir des sévices physiques ou sexuels.
La police a diffusé des photos de l'intérieur de cette cave basse et sombre où, non loin de la baignoire, est inscrit sur un panneau en bois le message suivant: "Je suis méchant depuis des années et des années". "Nous n'avons aucune idée pour le moment de qui est l'auteur (du message) et depuis combien de temps il est là", a déclaré lors d'une conférence de presse le porte-parole de la police, Lenny Harper.
Pièce de punition
Plusieurs victimes ont affirmé que cette cave servait de "pièce de punition"
où les enfants étaient mis à l'isolement et violentés, physiquement ou sexuellement.
Un certain nombre d'ossements ont également été trouvés dans le jardin de l'établissement, près de l'endroit où un crâne d'enfant avait été découvert le 23 février, selon le porte-parole. La plupart d'entre eux sont d'origine animale, et rien à ce stade ne permet de penser que les autres sont humains, selon le porte-parole.
Les enquêteurs estiment qu'une "culture" d'abus physiques ou sexuels a pu se développer à certaines périodes au Haut de la Garenne, ancien orphelinat devenu un foyer pour enfants en difficultés jusqu'en 1986, a-t-il expliqué. L'établissement a été transformé en auberge de jeunesse depuis 2004.
M. Harper a déclaré pencher davantage pour cette hypothèse que pour celle d'un "réseau pédophile", a déclaré M. Harper. "Il semble qu'à certaines périodes, (le Haut de la Garenne) fonctionnait comme il se doit", a-t-il ajouté.
Environ 160 victimes présumées se sont déclarées depuis le début des recherches
en novembre dernier, certaines faisant état de sévices systématiques sur une
période de 40 ans environ entre les années 1950 et la fin des années 1980.
La "maison de l'horreur" est un quadrilatère de deux étages, d'époque victorienne, bâti en pierre rose, bordé d'une vaste pelouse interdite aux chiens. A Jersey, la bâtisse est plus connue comme le Haut de la Garenne, sis rue de la Pouclée-et-des-Quatre-Chemins. Elle abrite depuis 2004 une auberge de jeunesse à 15 livres la nuitée, avec une jolie vue sur la mer et par grand beau sur les côtes de France. L'hébergement devait rouvrir le 3 mars pour une nouvelle saison estivale. "Il est à craindre un léger retard", constate un policier.
Le Haut de la Garenne avait été auparavant une maison de redressement puis une institution pour enfants en difficulté, qui accueillait une soixantaine de gamins âgés de moins de 13 ans. D'anciens pensionnaires affirment aujourd'hui y avoir subi des privations, des sévices physiques et surtout des viols, entre 1956 et 1986, année de la fermeture du lieu. La police a découvert l'existence d'au moins quatre caves murées. Ces lieux exigus, où un homme ne tient pas debout, auraient servi de cachots aux récalcitrants. Dans l'un d'eux se trouvait une vaste baignoire scellée où les victimes affirment qu'elles étaient plongées dans l'eau glacée avant d'être battues.
Un trouble parfum de meurtre règne également sur l'endroit. Dans le sol d'un corridor, un crâne d'enfant a été retrouvé, samedi 23 février. Eddie, un épagneul dressé à repérer les ossements enfouis, a fait la macabre découverte. Le chien aurait "signalé fortement" plusieurs autres lieux, potentielles sépultures qui restent encore à explorer.
En combinaison blanche, la police scientifique s'attelle depuis dix jours à de patientes excavations, effectuées à la truelle, "couche après couche". "C'est un travail très lent, complexe", explique Julie Roberts, une archéologue et anthropologue qui mène les recherches. Malgré le renfort d'une douzaine d'enquêteurs, le chantier pourrait durer encore quatre semaines. La vérification des témoignages pourrait, elle, prendre des mois.
La presse tabloïd britannique ne saurait attendre si longtemps. Pour un lectorat friand, elle suit quotidiennement les investigations entreprises dans ce qui est devenu sans coup férir "la maison de l'horreur" ou l'antre de "la terreur". Elle rapporte le calvaire des victimes, décrit les salles de torture équipées de piloris et de chaînes, révèle la découverte de menottes, évoque des débauches impliquant des notables, piste les suspects devant leur pas de porte, assure que d'autres pandémoniums existent encore sur l'île. Elle dénonce aussi le silence des insulaires anglo-normands, décrits comme secrets et renfermés, des "taiseux" qui auraient couvert ces turpitudes criminelles comme sont scellées les transactions dans ce paradis fiscal.
Dans l'église de Gouray, qui jouxte le Haut de la Garenne, l'office s'achève, ce dimanche 2 mars. Les paroissiens discutent suavement autour d'une part de gâteau au chocolat et d'un café au lait. Les conversations roulent sur l'air du temps et achoppent sur l'affaire. "Ça a été un choc pour nous", explique une vieille dame très digne. "Wait and see", lance un fermier retraité, rappelant que l'enquête n'en est qu'à ses débuts. Avec une exquise politesse, il est émis des réserves sur le battage médiatique. Le révérend Peter Williams, un Irlandais du Nord de 66 ans, arrivé il y a quatorze mois à Jersey, tente de défendre ses fidèles de l'opprobre collective. "Les journalistes ont tendance à penser que tout le monde savait mais ne disait rien, que les gens ont choisi de lâchement cacher les faits. Il n'y a aucune preuve de cela."
Le pasteur oscille entre la "compassion" pour les victimes et le sentiment diffus que l'amplitude donnée à l'affaire pourrait être exagérée. Pendant des décennies, les enfants venaient prier dans cette église. Ils étaient scolarisés avec les autres gamins du bourg. "J'ai parlé avec des gens qui étaient déjà là à l'époque. Ils n'ont rien vu. J'ai aussi rencontré d'anciens employés qui sont des gens d'une grande intégrité." Le révérend rappelle que les faits sont déjà anciens. "Le régime était très dur, certes. Il faut juste savoir établir la différence, définir la zone grise entre rigueur admissible et abus sexuels ou cruautés inacceptables."
L'île oscille entre accablement et agacement. Il traîne dans les conversations cette impression que l'on juge avec un saut de génération des méthodes d'éducation dépassées, où la coercition était la règle, où il fallait briser la résistance de l'enfant.
L'affaire ramène la population des décennies en arrière. Elle rappelle à cette île prospère, mitée de banques d'affaires, nantie du deuxième PNB d'Europe, qu'elle connut des temps autrement durs. "Nous étions élevés comme ça à l'époque, à la dure. Mon mari était battu par son père chaque fois qu'il était saoul", se souvient une vieille dame qu'on aurait pourtant crue tout droit issu de la gentry.
Dans ce climat délétère, entre surenchère et dénégation, l'enquête se poursuit au Haut de la Garenne. Lenny Harper, 56 ans, le chef adjoint de la police de Jersey, nous reçoit à l'intérieur du bâtiment. Des hommes s'affairent en silence, avec une fausse nonchalance. La poussière des excavations active régulièrement les détecteurs de fumée qui résonnent dans les couloirs.
Le discours de l'officier est prudent, traversé de "peut-être, j'insiste peut-être". "Tout le monde n'est pas suspect parmi les employés, assure-t-il. A certaines périodes, les enfants ont été traités comme ils devaient l'être. Mais à d'autres, il y a eu des abus systématiques et violents. Nous en sommes encore à réunir les preuves et il arrive de nouveaux éléments chaque jour." "Nous n'avons pas établi que quelqu'un ait été tué ou qu'une personne ait disparu", poursuit Lenny Harper. Dans les semaines à venir, l'examen du crâne au carbone 14 permettra de déterminer l'époque du décès. "Peut-être est-il là depuis bien plus longtemps", admet le policier, qui n'exclut pas une "fausse piste". Le lieu accueille des enfants depuis 1867 et servait à l'armée allemande quand l'île fut occupée.
Réfutant avoir évoqué des tortures, s'abstenant de commenter les informations les plus crapoteuses, Lenny Harper est certain en revanche qu'ont été perpétrés en ce lieu "des violences sexuelles et physiques", inadmissibles en quelque temps que ce soit. "Je suis convaincu que les victimes disent la vérité." La police aurait enregistré 160 témoignages et identifié une quarantaine de suspects. Pour l'heure, un seul a été arrêté et inculpé de trois viols entre 1969 et 1979. "Je ne crois pas à un réseau organisé. Je pense plutôt que ce lieu où se trouvaient des enfants vulnérables était une tentation pour des gens."
L'ampleur de l'affaire reste encore à déterminer mais le traumatisme collectif est immense. L'île compte aujourd'hui 90 000 habitants. Elle en recensait 60 000 dans les années 1960. Son modèle social est resté celui d'une petite ville où tout le monde connaît tout le monde. Membre de la couronne britannique mais pas du Royaume-Uni, Jersey a conservé une organisation politique originale, héritée de l'invasion normande. Longtemps, elle n'a disposé que d'une milice honoraire, constituée d'habitants élus. Dans les années 1950, a été créée en parallèle une police professionnelle qui s'est étoffée avec le temps. Mais jusqu'aux années 1970, les charges devaient toujours être soumises à un "centenier", notable élu qui décidait ou non de poursuivre le suspect.
Dès lors, les accusations d'enfants de basse extraction envers des citoyens connus et respectés avaient peu de chances d'aboutir. Des pensionnaires s'étaient déjà plaints dans le passé de mauvais traitements et de viols. En vain. Les autorités se défendent pourtant d'avoir couvert les agissements coupables. Mais dans une île encore empreinte de féodalisme et de ségrégation sociale, la suspicion vis-à-vis des dirigeants est forte. "Depuis quinze ans, les gens sont prêts à entendre les victimes. A cette époque, on ne croyait que l'autorité", préfère penser le révérend Williams. Les mauvaises habitudes ont longtemps survécu aux réformes.
En 2003, un homme tenta ainsi de faire chanter une personnalité de l'île qui l'aurait violé à de multiples reprises quand il était enfant. Le maître chanteur fut condamné, mais les accusations étayées qu'il portait ne furent jamais instruites... En 2007 encore, un membre du gouvernement insulaire, Stuart Syvret, ministre de la santé, dénonçait les soupçons qui pesaient sur les institutions infantiles. Il fut limogé quelques mois plus tard. "Il y a une culture du secret", accuse aujourd'hui le paria. Le premier ministre de l'île, Franck Walker, s'est empressé de dénoncer ceux qui voulaient ternir la réputation de l'île.
L'officier Lenny Harper s'est chargé de réveiller les consciences. Ayant travaillé à Belfast, Glasgow et Londres, le policier est arrivé dans l'île en 2002 pour une paisible fin de carrière. S'imprégnant de la société locale, cet Irlandais du Nord a vu remonter peu à peu les affaires de moeurs et les dénonciations classées sans suite, impliquant plusieurs établissements. En avril 2006, il décide d'ouvrir une enquête, d'abord discrète. En novembre 2007, est finalement lancé un appel à témoin. De toute l'Angleterre mais également d'Australie, les anciens pensionnaires du Haut de la Garenne trouvent enfin à qui s'épancher.
Lenny Harper sait que beaucoup de gens à Jersey attendent avec impatience son départ à la retraite, en septembre prochain. Les journalistes londoniens auront levé le siège avant. Peut-être sera-t-il alors possible de retrouver la tranquillité.
Benoît Hopquin
"Nous avons fait des découvertes d'une certaine importance qui tendent à corroborer certaines des allégations portant sur des infractions commises dans cette cave", a expliqué le chef-adjoint de la police, Lenny Harper, lors de sa conférence de presse quotidienne.
M. Harper n'a toutefois pas mentionné d'éventuelles traces d'ossements humains, quelques jours après la découverte d'un crâne d'enfant samedi au Haut-de-la-Garenne.
Il s'est gardé de divulguer la nature des objets retrouvés dans cette cave, alors que la presse évoquait la présence d'une baignoire en béton --ce que M. Harper a démenti-- et d'une paire de menottes qui auraient pu servir à des sévices contre les enfants.
Les fouilles, menées depuis une semaine, avaient permis mercredi de découvrir cette mystérieuse cave murée, remplie de pierres, d'argile et de gravats. Elle ne figurait pas sur les plans officiels de l'établissement, un ancien pensionnat transformé en foyer pour enfants en difficulté jusqu'en 1986, puis reconverti en auberge de jeunesse depuis 2004.
Cette imposante bâtisse en pierre sombre, entourée d'une pelouse soignée et cernée de champs de patates, est située en haut d'une falaise qui surplombe le petit village de Gorey, dont le château est une des attractions touristiques de l'île.
D'anciens pensionnaires du Haut-de-la-Garenne avaient mentionné l'existence d'une cave secrète où des enfants auraient fait l'objet de maltraitances et d'abus sexuels systématiques.
En pénétrant mercredi dans cette cave d'environ 4 mètres sur 4, un chien renifleur a eu une "réaction extrêmement forte", selon la police. C'est ce même chien spécialisé dans la détection de traces de cadavres ou de sang, Eddie, qui avait déjà découvert le crâne d'un enfant samedi dernier, et qui avait eu le même type de réaction.
Les opérations de déblayage de cette pièce se sont poursuivies jeudi et pourraient prendre encore quelque temps.
"C'est un processus lent, méthodique et très difficile et ça va prendre un certain temps", a déclaré le porte-parole à une assemblée de journalistes de plus en plus fournie chaque jour.
Les enquêteurs s'intéressent par ailleurs à une deuxième pièce souterraine, adjacente à la première, de taille similaire et elle aussi murée, dont l'existence a été découverte en perçant la première cave.
Une troisième pièce secrète, murée, a même été évoquée par des témoins, a confirmé M. Harper. Elle fera l'objet de fouilles ultérieures, selon lui.
Depuis le début de l'enquête, ouverte en novembre dernier, les enquêteurs estiment avoir déjà recensé quelque 160 victimes présumées, sur plusieurs décennies. Depuis la découverte d'un crâne d'enfant samedi, plus de 70 personnes se sont manifestées.
La population locale et les élus de cette île touristique, dépendance de la Couronne britannique devenue un centre financier international en raison de son statut de "paradis fiscal", sont sous le choc des révélations qui se multiplient dans la presse britannique.
"Tout cela nous gêne beaucoup, d'autant que les gens ici n'ont rien à cacher", a assuré à l'AFP une résidente de 60 ans, sous le couvert de l'anonymat. "C'est une situation très triste".
Le révérend Peter Williams a pour sa part mis en garde contre toute conclusion hâtive.
"Il y avait beaucoup de gens très dévoués" qui travaillaient au Haut-de-la-Garenne, a-t-il assuré à l'AFP.
XAVIER GOOSSENS CORRESPONDANT À LONDRES
Longtemps ignorées, les accusations de mauvais traitements à des enfants débouchent
sur une enquête. La stupeur et la peur ont envahi l'île.
Les idylliques Iles Anglo-Normandes ont aussi leurs chambres d'horreur. La police
de Jersey va continuer ce week-end la macabre exploration des caves et des chambres
secrètes d'une maison pour enfants de Jersey.
Cet établissement, joliment appelé, "Le Haut de la Garenne", a déjà livré un squelette d'enfants aux policiers et, aux enquêteurs, une série d'abominables histoires de pédophilie et de violences.
C'est en ce mois de février que la police de Jersey a finalement planté ses tentes devant "Le Haut de la Garenne". Cet établissement était il y a vingt ans le seul endroit de l'île où placer les jeunes et petits délinquants.
Selon un responsable, "il n'y avait que deux salles de détention dans l'établissement et on n'y peut pas enfermer les enfants pour de longues périodes". De trente à soixante garçons et filles de onze à quinze ans y vivaient surveillés par une quinzaine d'adultes.
Auberge de jeunesse
En 1986, "Le Haut de la Garenne" ferma ses portes parce qu'il ne comptait plus assez d'enfants et, selon les autorités, "n'était plus rentable". En 2004, cette vieille bâtisse victorienne fut modernisée à un coût de plus de trois millions d'euros et transformée en auberge de jeunesse avec cent lits.
Hélas, pendant ces transformations, un ouvrier découvrit dans les combles du "Haut de la Garenne", au-dessus des cuisines, des piloris. En 2006, la police de Jersey décidait de prendre au sérieux les histoires innombrables qui circulaient sur le traitement des enfants. L'année suivante, le ministre de la Santé de Jersey, M. Stuart Syvret, accusait son gouvernement de négligence et était forcé de démissionner. Le 22 août, le gouvernement de l'île ordonnait une enquête indépendante.
Et ce 23 février, le crâne d'un enfant était découvert dans une des caves. Ce n'est pas fini. Cette semaine, un des chiens dressés pour ce genre de besogne a montré "une réaction extrêmement forte" devant un des celliers.
La tâche de la police est difficile. Le sous-sol du "Haut de la Garenne", comme son nom l'indique tristement, est un dédale, une suite de caves murées. Que cachent-elles ? Qu'est-il devenu de ces enfants qui, disait-on aux petits détenus, "étaient rentrés chez eux" ou "avaient émigré" ?
La police de Jersey invite maintenant les anciens résidents à s'adresser à elle. Pour l'heure, elle enquête déjà sur 27 cas de mauvais traitements et a reçu les plaintes de plus de 160 personnes affirmant avoir été maltraitées au "Haut de la Garenne". De ces 160 personnes, 70 parlent de "caves".
Quelle réputation ?
Six pièces, selon la police, vont faire l'objet de recherches. Quarante personnes sont qualifiées par elle de "suspectes". M. Frank Walker, le Premier ministre de Jersey, admet que son île vit "sous un nuage", qu'elle est en butte aux soupçons. "C'est la bonne réputation de Jersey qui est en cause", juge M. Stuart Syvret.
A Londres, un groupe de députés britanniques a perdu patience et demande que le gouvernement et la justice britanniques interviennent dans une "semi-indépendante" dépendance de la Couronne, qui est "sérieusement compromise".
© La Libre Belgique 2008
Editeur responsable: Fondation Princesses de Croÿ et Massimo Lancellotti - 10 Rue Faider - 1060 Bruxelles - Belgique - Droit de réponse: postmaster@droitfondamental.eu